Phase deux du sabotage de l’accord avec l’Iran

Les néoconservateurs et les républicains opposants à l’accord sur le nucléaire iranien se sont tellement déchaînés que leurs efforts pour saboter l’accord vont probablement se poursuivre même s’il survit au Congrès alors que de nouveaux projets sont élaborés, écrit l’ancien analyste de la CIA Paul R. Pillar.

Par Paul R. Pillar

Quiconque en a assez d'entendre parler de l'accord visant à restreindre le programme nucléaire iranien n'obtiendra pas de soulagement de sitôt, malgré le vote du Congrès ce mois-ci qui est censé trancher la question. Il semble désormais probable que même si le Congrès, contrôlé par les Républicains, adoptait une résolution de désapprobation, une telle résolution ne survivrait pas à un veto présidentiel, ce qui signifie que l’accord lui-même entrerait en vigueur. Il est également possible que les opposants ne parviennent pas à obtenir les 60 voix nécessaires pour faire adopter une telle résolution au Sénat, auquel cas le résultat serait décidé encore plus tôt.

Si la question nucléaire iranienne était une question sur laquelle les personnes ayant honnêtement exprimé des divergences de fond avaient été abordées de manière constante, de manière sobre et raisonnée, on pourrait s'attendre à ce que ceux du côté des perdants acceptent le résultat et tournent leur attention vers la façon dont ils peut participer efficacement à une surveillance rigoureuse de la mise en œuvre de l'accord. Il existe en effet d’importantes possibilités pour le Congrès d’exercer un tel contrôle.

Le secrétaire d'État John Kerry lors d'une conférence de presse le 6 août 2015. (Photo du Département d'État)

Le secrétaire d'État John Kerry lors d'une conférence de presse le 6 août 2015. (Photo du Département d'État)

Mais le débat sur cette question a manqué de sobriété et d’honnêteté. Certains des principaux sources d'opposition à l'accord ont impliqué de vouloir que la question nucléaire iranienne s'envenime indéfiniment ou que l'administration Obama échoue dans ses efforts pour y remédier.

Le vote et l'éventuel veto qui auront lieu plus tard ce mois-ci ne marqueront donc que la fin d'un chapitre d'une lutte politique continue. Les opposants à l’accord continueront de tenter de le renverser même après son entrée en vigueur.

La division partisane des sentiments sur la question, qui, comme le souligne Jim Lobe, devenu de plus en plus aigu comme le reflètent les sondages d’opinion de l’année dernière, sera l’un des moteurs de la poursuite de l’opposition. Cette question a montré une tendance familière selon laquelle les membres du public qui ont peu de connaissances approfondies sur le sujet en question s'inspirent des dirigeants du parti auquel ils s'identifient le plus.

Un cycle auto-renforcé d'opposition catégorique de la part des politiciens républicains et d'opposition conséquente de la part d'une base républicaine qui prend les commandes a placé la question nucléaire iranienne sur une trajectoire similaire à celle de la loi sur les soins abordables, c'est-à-dire une préoccupation sans fin de la part du Congrès de la moitié du spectre politique. en le tuant plutôt qu'en le mettant en œuvre, peu importe ce que l'expérience peut montrer, cela fonctionne ou ne fonctionne pas.

Les efforts visant à tuer l’accord avec l’Iran, après les votes de ce mois qui détermineront si l’accord entrera en vigueur, viseront principalement à amener les États-Unis à ne pas respecter leurs engagements dans le cadre de l’accord. Étant donné que les États-Unis n’ont aucune obligation au titre de l’accord autre que de mettre fin à certaines des sanctions qu’ils infligent sous la forme de sanctions économiques, la stratégie de destruction de l’accord impliquera d’imposer de nouvelles sanctions à l’Iran jusqu’à ce que Téhéran dépasse les limites de l’accord. sa tolérance à l'égard d'un tel comportement contournant l'accord.

Les tactiques spécifiques pourraient consister en fait à rétablir certaines des sanctions liées au nucléaire qui devraient être assouplies en vertu de l’accord, mais sous une nouvelle étiquette, comme celle de terrorisme ou quelque chose ayant à voir avec un autre comportement iranien. Des idées ont déjà été avancées le long de ces lignes. D'autres idées créatives des opposants incluent avoir des États plutôt que le gouvernement fédéral sanctionner l’Iran.

Toutes ces manœuvres rendront difficile aux dirigeants iraniens attachés au respect de l’accord de détourner les accusations de leurs opposants nationaux selon lesquelles les États-Unis ont espionné l’Iran et qu’il n’est pas dans l’intérêt de l’Iran de continuer à respecter l’accord.

Les opposants américains à l’accord compléteront leurs manœuvres de sanctions par des efforts continus pour mettre en avant tout comportement iranien qui est répréhensible ou peut être présenté comme tel. L’importance qui a déjà été accordée à l’affirmation des opposants selon laquelle l’allègement des sanctions constituerait une « aubaine financière » qui financerait une activité iranienne « néfaste » accrue dans la région prépare bien sûr le terrain pour attirer plus tard l’attention sur à peu près tout ce qui pourrait se produire. L’Iran fera effectivement ou prétendument des actions au Moyen-Orient auxquelles on peut s’opposer.

L’argument sera qu’un tel comportement est une conséquence directe de la « manne », peu importe dans quelle mesure il s’agit en réalité d’une réaction de Téhéran à des événements qu’il n’a pas provoqués et qui n’a que peu ou rien à voir avec les finances iraniennes. Tout cela s’ajoutera au fait de rendre publics tout ce qui peut être interprété comme une violation iranienne de l’accord nucléaire lui-même (ce qui est différent du processus nécessaire de surveillance soutenue, prudente et responsable).

Nous avons déjà eu un aperçu de ce type de tactique avec de nombreuses interprétations similaires concernant le respect par l’Iran du Plan d’action commun, l’accord préliminaire conclu en 2013, pour lequel le bilan iranien actuel en matière de respect est excellent.

Le calendrier des élections présidentielles américaines a donné aux opposants inconditionnels de l’accord nucléaire une incitation supplémentaire à infliger un sabotage meurtrier à l’accord au cours des 16 prochains mois. La perspective de l’entrée d’un républicain à la Maison Blanche en janvier 2017 pourrait à cet égard présenter davantage une vulnérabilité qu’une opportunité pour les opposants.

Les candidats républicains à la présidentielle rivalisent les uns avec les autres pour dire à la base électorale des primaires avec quelle rapidité et péremptoire ils renonceraient à l'accord avec l'Iran, la seule différence étant de savoir si cela se ferait dès le premier jour de leur mandat, si cette renonciation prendrait lieu avant ou après consultation des conseillers, etc.

Il serait difficile pour l’un de ces candidats, s’il était élu, de revenir sur une promesse aussi souvent répétée. Mais une telle renonciation présidentielle serait une renonciation unilatérale plus directe et plus flagrante des États-Unis à un accord multilatéral que même certaines des tactiques de rétablissement des sanctions les plus agressives mentionnées plus haut. Et une telle renonciation interviendrait après trois ans (à compter de l’entrée en vigueur du JPOA) pendant lesquels l’Iran aurait respecté ses engagements au titre de l’accord et ne sauraient en train de fabriquer une arme nucléaire.

Le malaise que ressentirait le futur président dans cette situation refléterait ce qui a toujours été la préoccupation sous-jacente des opposants confirmés à l’accord nucléaire : non pas que l’accord échoue, mais qu’il réussisse.

Paul R. Pillar, au cours de ses 28 années à la Central Intelligence Agency, est devenu l'un des meilleurs analystes de l'agence. Il est aujourd'hui professeur invité à l'Université de Georgetown pour les études de sécurité. (Cet article est paru pour la première fois sous un blog sur le site Web de National Interest. Reproduit avec la permission de l'auteur.)

8 commentaires pour “Phase deux du sabotage de l’accord avec l’Iran »

  1. Andrew Nichols
    Septembre 2, 2015 à 21: 07

    Combien de fois faut-il vous le dire avant de vous réveiller et de réaliser que c'est fini ? C'est P5 = 1 et non P1 et les hommes d'affaires et les diplomates de partout sur la planète, en dehors de cette petite population d'Américains, d'Israéliens et des théocraties saoudiennes/du Golfe, affluent à Téhéran maintenant que la plus grande hypocrisie impériale (le programme nucléaire iranien inexistant) est arrivée. à une fin inévitable. L’Amérique doit ratifier ou faire face au ridicule et à la perte de la face lorsqu’elle se rend compte que plus personne ne se soucie de ce que pensent les narcissiques appartenant aux fabricants d’armes israéliens au Congrès et au Sénat américains.

  2. JWalters
    Septembre 2, 2015 à 19: 35

    C’est peut-être le moyen le plus pratique d’éliminer la corruption criminelle qui pollue si profondément le processus politique.

  3. Joe Tedesky
    Septembre 1, 2015 à 15: 39

    Je suis énervé par des gens comme Donald Trump, qui s'opposent à l'accord P5+1 d'Obama. Trump a proclamé l'autre jour que non seulement cet accord avec l'Iran était « un mauvais accord », mais que nous (les États-Unis) sommes même allés jusqu'à donner à l'Iran 150 milliards de dollars. Trump n’a jamais ajouté que les 150 milliards que nous avons donnés à l’Iran étaient au départ l’argent de l’Iran. Trump n’est pas le seul candidat à la présidence à dire des choses comme ça, ils le font tous. Une fois de plus, les mensonges feront l’affaire des électeurs mal informés. Si vous connaissez quelqu’un qui croit cela, alors redressez-le… s’il vous plaît !

    L’Iran évite d’investir dans les pays occidentaux. Il y a actuellement des articles qui le disent. La France espérait vendre des avions iraniens, mais l’Iran a plutôt décidé d’acheter ses avions de l’armée de l’air à la Russie. Pouvez-vous blâmer les Iraniens ? Que feriez-vous si vous étiez Iranien ? Je veux dire, ce n’est pas comme si l’Iran devait se sentir à l’aise en achetant à l’Occident. Quand l’Iran entend ce que ces stupides politiciens américains ont à dire, dois-je en dire plus ? La vérité est qu’Israël ne veut pas que l’Iran acquière davantage de pouvoir au Moyen-Orient. La puissance du Moyen-Orient ne peut être attribuée à nul autre qu’à Israël. C'est si simple. Lorsque les États-Unis décideront de cesser d’opposer leur veto aux résolutions de l’ONU visant à freiner le traitement violent des Palestiniens par Israël, et qu’ils cesseront également d’opposer leur veto à toute résolution visant à amener Israël à s’aligner sur son programme de prolifération nucléaire, alors la violence continuera au Moyen-Orient. George Marshall avait raison lorsqu’il mettait en garde Truman contre le fait de jouer la carte du favoritisme lorsqu’il s’agissait de reconnaître Israël. Toute cette histoire d’Israël n’est rien d’autre qu’un échantillon de ce qu’est le lobbying. Tous ces politiciens patriotes américains reçoivent de l’argent des groupes de pression étrangers. Ils reçoivent leurs ordres de gens qui ne sont même pas américains. Comment tout cela peut être juste et illégal, cela ne fait que vous montrer à quel point notre système est devenu corrompu. Nous avons besoin de plus qu’un bon président, l’Amérique a besoin d’un tout nouveau gouvernement. Il est grand temps que l’Amérique commence à faire le ménage. Vous pouvez commencer par prendre un balai et balayer du mieux que vous pouvez tout l’argent influent. Bonne chance!

    • Joe Tedesky
      Septembre 1, 2015 à 15: 43

      Comment tout cela peut être juste et légal, cela ne fait que vous montrer à quel point notre système est devenu corrompu.

      désolé, illégal aurait dû lire légal. Pardonne mes erreurs.

    • Daniel
      Septembre 1, 2015 à 17: 34

      Je me demande quelle part de l’argent qu’Israël dépense pour les politiciens américains est de l’argent que nous leur avons donné en premier lieu en guise d’aide ? Cela me semblerait être un pot-de-vin – faites-les tous payer en vertu de la loi RICO !

      • JWalters
        Septembre 2, 2015 à 19: 32

        C'est peut-être le moyen le plus pratique d'éliminer la corruption criminelle qui pollue si profondément le processus politique américain.

      • JWalters
        Septembre 2, 2015 à 19: 34

        C’est peut-être le moyen le plus pratique d’éliminer la corruption criminelle qui pollue si profondément le processus politique.

    • Pierre Loeb
      Septembre 3, 2015 à 06: 03

      Bien dit, M. Tedesky !!

      —Peter Loeb, Boston, MA, États-Unis

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